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FREDERIQUE DEGHELT, journaliste |
Oui
oui je pourrais vous dire qu’en suivant les chemins
d’écriture de Vincent Pachès vous rencontrerez
des mots qui vous emberlificotent, des mots qu’il a
présentés les uns aux autres et qui se content
maintenant fleurette au fil de ses pages. Je pourrais vous
raconter que dans ses écrits, des vaches côtoient
des hippopotames en grandes conversations avec des fourmis.
Je pourrais ajouter que lire sa poésie rend heureux
et qu’on va mieux si on n’allait pas très
bien et qu’à ce titre, ses livres devraient être
remboursés par la sécurité sociale.
Mais enfin tout ce que je pourrais vous en dire avec des
mots ne remplacerait jamais la lecture que vous ferez, ce
parcours des yeux soudain embués par la tendresse
de les découvrir.
Alors je vais vous raconter ce que vous ne lirez pas dans sa poésie. Par
exemple, le son de sa voix, faite pour le murmure, comme un coussin de mousse
où poser les vagabondages qui s’échappent de sa plume. (...)
Autre curiosité, il a traversé l’univers impitoyable de l’entreprise
en saupoudrant sa poésie comme un marchand de sable venu adoucir le monde
brutal des hommes d’affaire. On l’imagine comme un gamin facétieux,
déambulant tout en sourires, tel un personnage de Prévert, un être
traversant le monde de l’avoir. Ah j’oubliais, mais on le devine
dans la pudeur des personnages croisés dans ses textes, en lisant ce portrait,
il ne se reconnaîtra pas. Comme tous les grands, il est modeste, et ça
non plus ce n’est plus très à la mode ! (...) À le
regarder feuilleter les beaux livres qu’il a publié avec André François
ou d’autres illustrateurs, on devine son amour du beau papier, une joie
de vivre aussi. C’est sans doute ce que nous suggèrent les mots
qu’il écrit, une certaine jouissance à nommer le monde. |
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SABINE BLEDNIAK, Directrice littéraire
des Editions Alternatives |
Chez Vincent Pachès, les animaux ont des états
d’âmes, les espaces vibrent de sensations contraires
et les vivants déambulent, toujours entre deux questions,
porteurs d’une condition humaine où rien n’est
sûr mais où tout est possible. Ici, les silences
sont habités et la vérité surgit souvent
au détour du mensonge. Monde étrange mais non
étranger, car l’écriture imprime en nous
sa petite musique de chambre, renvoie à l’intimité
d’une émotion, d’un sentiment déjà
éprouvé mais jamais énoncé.
Vincent Pachès a le goût des mots, de tous les
mots, surtout de ceux qui ont l’air de rien ouvrent derrière
eux tout un champ d’images. Comme un goûteur passionné,
il en connaît les infinies saveurs, jouant avec elles
avec un sens rare du détournement, nous invitant de l’autre
côté du miroir, à goûter à
notre tour leur extrême douceur ou fugace amertume. Drôles,
tristes, à multiples facettes et rebondissements, comme
ces poupées russes qui n’en finissent pas d’ouvrir
leur ventre, « les mots, ici, en disent plus long que
ce qu’ils sont ». A nous de tendre l’oreille…
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ANNICK DROGOU, Agrégée de grammaire |
Parce qu’il ne peut vivre sans curiosité de soi
et des autres, Vincent prouve, dans ce festin des mots qu’il
s’offre chaque jour en fin gourmet, que seul le goût
des mots permet de goûter le monde. Et il nous convie
à changer de sens, laissant sur le bas-côté
les quarts d’images et les demi-mots et leur cortège
de langue de bois, sans émotion et sans rêve. Vivre
de mots, avec eux, dans leur fréquentation assidue et
ardue, dans cette tentation permanente de l’impossible
réconciliation avec soi-même. Paroles en l’air
à vous couper le souffle, à les lire on reste
sans voix, tant ce voyage dans l’amour des mots s’avère
définitivement l’unique langage, l’évidente
vigilance. Le Poète est le laboureur nourricier, l’ultime
guetteur aux confins du non-dit, dans l’impatience vivifiante
de l’encre qui refuse d’être immobile.
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A propos
de K LIBRE |
SERGE VALLON, Psychanalyste |
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André François, peintre, et Vincent Pachès,
poète, interviennent dans la revue
VST depuis plus de15 ans. Ils tiennent rubrique
de mots et d’images.
VST revue du mouvement Céméa, a été fondée il y a déjà 50 ans
pour soutenir le mouvement de rénovation et d’humanisation de
la psychiatrie française avec Daumezon, Bonnafé, Oury et les
autres grandes figures du désaliénisme. Elle se bat, en ce début
de XXI° siècle, encore et toujours pour la reconnaissance des
souffrances psychiques et sociales, pour une véritable formation
continuée et critique des professionnels. Elle entend mettre
le sujet humain au centre des institutions et des dispositifs.
Revue de débat et d’information, VST postule que la réflexion
scientifique et professionnelle est aussi une réflexion culturelle
: Quelle place accordons-nous à la folie, au handicap, à la
marginalité psychique ou sociale ? Quelle place pour cet inconnu
dans notre tête, notre voisinage, ou notre vie commune.
L’artiste, le poète, commercent avec cet inconnu. De leur atelier,
ils ramènent des images et des mots nouveaux. Ils nous aident
à déconstruire nos frontières et nos préjugés et à reconstruire
un monde autre, plus lucide et donc éventuellement plus tolérant.
Si nous le décidons.
Cette rubrique régulière, rassemblée ici pour
le plaisir du lecteur-spectateur, ouvre et ferme chaque numéro.
Elle donne toute sa place à des coups de gueule salutaires.
Le dessin du vieux maître André y resplendit de vigueur et de
malice, le poème agile de Vincent rebondit avec la souplesse
du chat. Regardez-y de près : les coups de gueule se font en
écho, le dessin répond au poème. Regardez plus près encore :
le dessin se dédouble en masculin et féminin, en corps et en
regards, le texte énonce un paradoxe qu’il résout en le déplaçant.
Ainsi va notre vie, affrontée à nous-même dans une division
intime.
Merci les artistes ! |
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SANDRINE MAILLET,
Bibliothèque Nationale de France, réserve
des livres rares |
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... Les courts textes de Vincent Pachès disent avec délicatesse,
subtilité et humour la difficulté d’être au monde. Ils nous
parlent de plaisir, de crime, de mémoire, d’oubli, d’amour,
de séparation, de solitude. Les mots résonnent dans toute leur
richesse, vibrent de façon polyphonique, dépassent leur acception
première pour nous amener au-delà de la réalité brute. Les phrases
se déroulent comme des séquences d’unités brèves qui se répondent
à travers un rythme et une certaine sonorité de la langue. Jeu
régulier d’équilibre et de déséquilibre qui est bien autre chose
qu’un ornement de façade construisant des harmonies. Car tout
bouge, se répond et se transforme. Les phrases se miroitent
l’une l’autre, se reflètent en eau trouble.
Les dessins d’André François, parfois délimités par un trait
noir, rageur, massif, sont comme jetés sur le papier. Le cadre,
les sujets représentés sont à la fois parfaitement maîtrisés
et enfantins dans leurs discontinuités, dans leurs débordements
maladroits. Ce sont des coups de griffe en noir et blanc comme
pour mieux faire entendre la réalité crue.
L’étrange vision de nos fêlures intimes est renforcée par les
textes de Vincent Pachès qui, loin d’illustrer les dessins,
offrent un nouveau champ d’exploration. Là aussi la force et
la vulnérabilité tourbillonnent en un même mouvement. Comme
le note très justement Pierre Etaix dans sa préface : « Si l’un
ne doit rien à l’autre et réciproquement, ensemble ils accomplissent,
chacun dans son propre mode d’expression, une œuvre unique baignée
d’un humour salvateur qui s’épanouit dans une parfaite complicité
». |
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PIERRE ETAIX |
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Parmi
les nombreux et fascinants aspects de l’œuvre d’André
François, il en est un qui m’impressionne tout
particulièrement. C’est le parfait équilibre
entre le fond et la forme, le propos contenu dans la beauté
plastique parfaitement exprimée et sans cesse renouvelée.
La simplicité des œuvres met en évidence
ce qui doit être reçu au premier coup d’œil.
C’est pourquoi un texte additif ou une légende
d’accompagnement sont résolument superfétatoires.
Il en va absolument de même pour les textes drolatiques
ou poétiquement dramatiques de Vincent Pachès,
dont la pertinence, la force, ou le raffinement se passent d’illustrations
redondantes ou pléonastiques.
Pourtant,loin
du paradoxe, la rencontre de ces deux personnalités exemplaires
démontre admirablement un phénomène de
complémentarité, car si l’un ne doit rien
à l’autre et réciproquement, ensemble ils
accomplissent, chacun dans son propre mode d’expression,
une œuvre unique baignée d’un humour salvateur
qui s’épanouit dans une parfaite complicité.
Dans d’autres domaines, il y eut déjà Django
Reinhardt et Stéphane Grapelli, Stan Laurel et Olivier
Hardy, Ginger Rogers et Fred Astaire.
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